22 février 2007
Seul
Mon but est de faire l'aller-retour Rennes/Angers dans la journée. L'itinéraire proposé avec l'engagement aux Flèches de l'Ouest prévoit une distance totale de 276 km. Nous sommes le 22 février. Ceci étant posé, rouler de nuit est donc inévitable. J'en ai l'habitude, mais ce sera, cependant, seulement la deuxième fois en hiver.
Vers 7 h un coup d'œil à la fenêtre m'a fait voir une route sèche. Je persiste donc dans mes préparatifs. Mais quand vers 7 h 45 je pars alors que le jour se lève, il commence à pleuvoir. D'abord, je n'y crois pas trop, mais cette pluie régulière, supportable car elle ne détrempe pas d'un coup, me poursuivra pratiquement toute la matinée. Elle est accompagnée d'un vent doux, assez fort, en provenance du sud-ouest, qui va donc partiellement contrarier la progression vers Angers.
Après Saint-Erblon où je comprends que je ne pourrai pas me dispenser de mettre la veste imperméable, je peux éteindre les lumières. Le trafic matinal vers Rennes faiblit. La grisaille mouillée est d'un très grande tristesse.
Le raidillon de Chanteloup est franchi en employant un très faible développement (28/19 soit 3,09 m) et de plus en ne pédalant pas vite ; pour la suite tout se passera donc comme s'il n'avait pas existé. La côte située entre le Sel-de-Bretagne et la Bosse-de-Bretagne est franchie suivant la même technique : il ne faut en aucun cas entamer les réserves avec ce vent contraire et cette pluie qui demande de plus en plus de vigilance.
La Bosse-de-Bretagne. La première carte postale est mise dans la boîte aux lettres collée à l'église, emplacement que je repère soigneusement car il faudra la retrouver ce soir, dans la nuit.
Un café pour se réchauffer un peu, et en route vers Ercée-en-Lamée, Teillay avec la traversée de sa forêt puis Rougée après une petite côte. J'aperçois une boulangerie-pâtisserie un peu en retrait de la rue que je dois suivre. Je m'y arrête et déguste une tarte aux pommes.
À la Prévière il devient possible de quitter l'imperméable ; il est midi. À 12 h 40 je suis devant le château de Challain-la-Potherie. C'est l'heure du déjeuner et il y a là un petit restaurant qui me convient bien. À 13 h 30 la carte postale est déposée dans la boîte aux lettres et c'est le départ vers Angers.
Le ciel jusque là d'un gris uniforme est maintenant parsemé d'inquiétants cumulonimbus entre lesquels les rayons du soleil arrivent à s'infiltrer pour donner lieu à de bienfaisantes éclaircies.
Chazé-sur-Argos et Raguin c'est en fait pratiquement la même chose. Un panneau indiquant le château de Raguin est à l'origine d'une erreur d'itinéraire : je continue sur la D183 au lieu de prendre la D73. Je m'en rends compte au bout de 2 km environ : petit contretemps sans grande importance.
En direction de Vern-d'Anjou, je suis sous le soleil avec un vent latéral soutenu et, devant moi, le ciel devient vraiment très noir. Nul doute : le déluge m'attend. Un peu après Saint-Clément-de-la-Place un abribus providentiel me permet d'échapper aux grosses gouttes qui ont déjà commencé à me tremper. Je resterai là une bonne vingtaine de minutes en attendant que l'impressionnante masse nuageuse ait fini de s'écrouler. J'en profite pour enfiler les couvre-chaussures que je ne quitterai plus de la journée.
L'arrivée à Angers s'effectuera dans un enfer de voitures et de poids lourds charriant de l'eau, de pistes soi-disant cyclables détrempées, bourrées de flaques, de brindilles d'arbres, de gravillons et de détritus divers, sans oublier quelques voitures stationnées en plein milieu. C'est un miracle de ne pas avoir crevé dans de telles conditions. Par deux fois en voulant me diriger vers le centre-ville, j'ai échoué sur des routes réservées aux voitures : je me suis donc un peu perdu.
Vers 16 h je suis dans le quartier du commissariat et, après m'être renseigné auprès de passants, je trouve une boîte aux lettres pour déposer la carte d'arrivée et la carte de départ pour la flèche Angers/Rennes.
Quitter Angers sera plus facile que d'y arriver. Quartier de Belle-Beille trouvé aisément ; avenue Patton trouvée après quelques renseignements ; par contre, je ne vois pas d'usine Bull, existe-t-elle encore ? Je finis par tourner à droite car de toute manière si on continue tout droit on débouche sur une route réservée aux voitures.
J'hésite ensuite un peu avant de prendre une bretelle qui mène sur une « quatre voies ». Est-ce-une bonne option, je n'en sais rien, mais je trouve une route vers Saint-Clément-de-la Place à quelques centaines de mètres, sur la gauche.
Maintenant le retour peut commencer tranquillement.
Le vent souffle de trois quarts arrière et la progression est aisée sur une chaussée qui sèche peu à peu. Des restes de gros nuages traînent par-ci par-là dans un ciel pâle éclairé par un soleil qui commence à descendre nettement sur l'horizon.
Arrêt à Saint-Clément-de-la-Place vers 17 h 20 pour enlever l'imperméable et pour communiquer ma position à la maison.
Arrêt à Vern-d'Anjou où je consomme un « diabolo grenadine » : je commence à avoir un peu soif et un peu de boisson sucrée ne fera pas de mal ; je n'ai rien mangé depuis midi.
À 18 h 50 je suis à Challain-la-Potherie, au crépuscule. Je n'ai pas encore allumé l'éclairage.
Je fais un arrêt d'environ une demi-heure au même restaurant qu'à midi. À 19 h 25 la carte postale de contrôle est envoyée et la nuit est complètement tombée. Chasuble enfilée, éclairage allumé et c'est le départ vers Rennes.
La route est sèche. Le vent est la plupart du temps favorable. Les nuages laissent assez souvent apercevoir le croissant de lune. La toute nouvelle torche Cateye E530 avec sa lampe LED délivre un bon éclairage. Il n'y a pas trop de circulation. C'est très agréable.
En direction de Carbay, et presqu'en haut d'une petite côte, il faut tourner à gauche pour rejoindre Soudan (D203/D109). Dans l'obscurité, c'est in extremis que j'ai aperçu l'indication « Soudan » dévoilée par le faisceau de ma torche.
Aux environs de Soudan je vois nettement la ville de Châteaubriant, illuminée, sur ma gauche. À l'aller, de jour, la proximité de la ville ne pouvait être ainsi révélée et je ne l'avais pas remarquée.
À Rougé, je fais un nouvel arrêt pour signaler ma position. Il est 21 h 15 j'envisage donc une arrivée vers minuit. La lune n'est pour ainsi dire pas masquée par les nuages, mais quelques gouttes commencent néanmoins à tomber ; j'essaie de ne pas y prêter attention.
Hésitation sur la direction à prendre quand je rencontre la D772 (celle qui relie Bain-de-Bretagne et Châteaubriant) ; je n'ai pas le courage de sortir la carte et de mettre la lampe frontale, d'autant plus que la pluie se précise. Résultat : un kilomètre dans la mauvaise direction avant de faire demi-tour. Lors de la traversée de la Forêt de Teillay, je suis assez tendu, craignant qu'un animal ne débouche inopinément sur la route.
À Ercé-en-Lamée, un café est encore ouvert. Une telle éventualité ne se représentera plus dans la nuit, donc autant en profiter : boire quelque chose de chaud n'est pas pour me déplaire. Arrêt d'un quart d'heure environ.
Lorsque je sors, je suis surpris par l'intensité de la pluie et le bruit du vent. Il faut enfiler l'imperméable, et vite.
À partir de maintenant, je connais bien la route jusqu'à Rennes, mais il faut rester concentré car je suis seul dans cette nuit encore hivernale et très agitée.
La côte qui se présente à la sortie de la Bosse-de-Bretagne est montée calmement avec le 40/26 (3,23 m ; 11,6 km/h pour un tour de pédalier par seconde), toujours dans la tempête. Un premier virage sur la droite, un second sur la gauche, la petite route sur la droite, les arbres de chaque côté de la route et voilà, je suis en haut. Il est bon d'avoir ainsi quelques repères pour se situer lorsque l'on est accompagné par la solitude exacerbée par la nuit.
Il n'est pas question de laisser le vélo prendre de la vitesse dans la descente rapide dont la fin précède un bref rebond vers le carrefour avec la D777 : je ne suis pas à l'abri d'une bourrasque, de la rencontre avec une branche d'arbre cassée et en plus l'eau ruisselle sur la route déjà jonchée de débris légers de végétation fraîchement arrachés. Le court raidillon qui conduit vers le Sel-de-Bretagne est aussi franchi avec le 40/26 ; il est parsemé de gravillons laissés par des travaux récents. La côte qui suit la sortie du bourg en direction de Chanteloup est montée au même rythme alors que la pluie s'arrête et que le vent se calme un peu.
Je suis en mesure d'augmenter la cadence et c'est assez rapidement que je franchis les passages qui mènent jusqu'à la Régère alors que je croise plusieurs voitures qui viennent de descendre du Petit-Fougeray. J'ai l'impression qu'elles vont bien vite, et certains de leurs conducteurs ne semblent pas en état de se rappeler l'existence des feux de croisement.
C'est « au pas » que je descends Chanteloup à travers tous les pièges que peuvent présenter pour le cycliste, surtout de nuit et en l'absence d'éclairage public, les aménagements urbains actuels de la chaussée. Bref, voilà 4 heures que la torche Cateye E530 fonctionne sans faiblir malgré les secousses et l'eau ; elle remplit bien sa mission.
Quelques centaines de mètres plus loin, c'est le virage à gauche où on s'aperçoit (même de nuit, quand on est cycliste !) que la descente est finie ; puis c'est quelques kilomètres de faux-plat. On domine alors le bassin de Rennes et au loin apparaissent les lumières de la grande ville qui occupent pratiquement toute l'étendue du champ de vision. Descente, traversées prudentes de Bourgbarré et de Saint-Erblon. Il est 0 h 15 quand, peu après, j'arrive à Chantepie.
Le compteur indique 285,32 km après avoir roulé pendant 12 h 51 min à la vitesse moyenne de 22,18 km/h. Je me suis donc arrêté pendant environ 3 h 40 min.
Il s'agit presque d'une allure audax, soutenue sans fatigue en utilisant essentiellement sur le plat les braquets 40/16 (5,25 m), 40/15 (5,60 m) et 40/14 (6,00 m) suivant les circonstances.
la Bosse | Rougée | la Prévière | Challain | abribus | Angers | Saint-Clément | Vern d'Anjou | Challain | Rougée | Ercé-en-Lamée | la Bosse | Total |
15 min | 15 min | 10 min | 50 min | 20 min | 15 min | 15 min | 10 min | 35 min | 10 min | 15 min | 10 min | 220 min |